Le Chef de Bataillon ROBITAILLE, Commandant le
3e Bataillon du 1e Régiment Etranger d’Infanterie
à
monsieur le Colonel, Commandant le 1e Etranger

BEL ABBES
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J'ai l’honneur de vous envoyer à toutes fins utiles la relation de quelques-uns des beaux faits accomplis par les Légionnaires du 11e Etranger.
Cette relation dans toute sa sécheresse est l’expression de la plus nue des vérités, sans arrangements et sans exécration. Il est certain que par suite de l’internement de la plupart des chefs directs du 11e consécutif à la capitulation du groupe de C.A. DUBUISSON le 22 Juin à 0 heure ; beaucoup de légionnaires de ce magnifique Régiment, qui se battait encore à 6 h 15 après l’heure de le capitulation ne se verront pas décernés des récompenses que dans d'autre unités on a distribuées non pas à titre d'action d’éclat mais au titre souvent de moindre veulerie ou pour essayer de masquer des défaillances.
Pourrait-on comprendre autrement la rapidité avec laquelle certains Corps sont allés de la frontière belge à la frontière espagnole ?.....................
Il importait, je crois qu'il fut dit que si les légionnaires du 11e n'ont pas été couverts de croix, ce n'est pas parce qu’ils se sont mal tenus au feu……. les témoignages de l'ennemi sont là pour prouver le contraire, mais parce que la capitulation les a prives de ceux qui pouvaient signer ces récompenses et que le 11e n’en a pas moins été un splendide Régiment de Marche de la Légion Etrangère.

Signé: ROBITAILLE
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Bureau du Colonel
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No 14.854/D.

COPIE CONFORME NOTIFIE à
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- D.C.R.E.I
- I – II - III/1er R.E.I.
- Archives.

 

……. Pour lecture et commentaire à tout leu personnel réuni.
Sidi Bel Abbes, le 10 Octobre 1940
Le Lt. Colonel BOUTY, Cdt. Le 1er R.E.I.

 

11e REGIMENT ETRANGER D’INFANTERIE
DIGNE DES ANCIENS

 

Les armes sont déposé ; les blessés, les articulations encore raide commencent à rentrer. Les évadés des geôles allemandes, hâves, tanés, recuits arrivent les uns après les autres. La Maison-mère de Bel Abbes voit chaque jour apparaitre d'anciennes figures connues. Seuls ne rentreront pàs jamais les Héros de LIGUANT, d'INOR, de SAINT GERMAIN ; ceux-là, et ils sont si nombreux que les dénommer me serait impossible, ont tout donné jusqu'à leur dernière goutte de sang pour laisser intacte les traditions "LEGION".
Il y a juste un an que nous partions enthousiastes, certains que la Patrie saurait nous demander les efforts que nous voulions qu'elle attende de nous. Cette guerre, nous l'avons faite "A LA LEGIONAIRES". Notre vie était offerte à la patrie dès la minute où le train s'ébranlant vers le port d’embarquement, notre musique nous jouait sous le hall de la gare le coup de "BOUDIN" du départ. Le destin n'a pas voulu de nous, bien que nous ayons tout fait pour échapper à la, honte de voir l'ennemi fouler notre sol en vainqueur. Si nous rentrons, la mort dans l'âme après avoir assistés à. tant de spectacles écœurants et a voir bu le calice de le défaite jusqu'à la lie, nous avons quand même le droit d’être fiers de notre 11e il a été digne des anciens.

Qu'importe que les jaloux, les poltrons, les champions de cross stratégique viennent maintenant expliquez le coup.et essayer de tenir notre Gloire.
Nous n'avons pas besoin de couvrir des défaillances par des discours, car chez nous, des défaillances il n'y en a pas eu.
Quand, seul, un régiment soutient 14 heures durant le choc d’une Division entière - la 55e Division allemande - réputée comme une des plus belles - appuyée par les Stossstruppen d’autre Division, quand l'ennemi harassé, décimé, s'arrête pour ramasser ses 2500 morts- ce Régiment peut dire qu'il ne lui manque pas un pouce de terrain………..Quand à la sonnerie du fatidique «CESSEZ LE FEU » il ne reste plus que 578 rationnaires su 3009 que comptait l'effectif et que les survivants restent bien groupés dans le main de leur 23 Officiers restant sur 81……..
Quand on a reçu du vainqueur ce compliment « Si tous les Régiments de France avaient été à la taille de votre Régiment de Légion, nous n’aurions jamais pu mettre un pied en France……
On n'a pas besoin de répondre à de haineux détracteurs.

Qu'il me soit permis toutefois, à moi qui les ai suivis du premier au dernier jour de venir compter quelques-uns des exploits de ce Magnifique 11e
Je ne citerai aucun nom…....

Ceux qui dorment dans la Gloire veulent garder cet anonymat qui fait notre force à la légion.
Ceux qui ont souffert dans leur chair mutilée ne désirent pas de noms sur leurs cicatrices.
Et ceux qui ont pleuré de rage et de honte, quand il a fallu tendre des poignets Invaincus à un ennemi arrogant, estiment qu'il faut attendre une heure plus faste pour nommer les Héros -Il y en aurait d'ailleurs beaucoup trop à citer.

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La neige glacée coure les ondulations de ce paysage lorrain. 19 dégrés au dessous de zero.
01.01.1940 – 02.01.1940
Dans la nuit du 1er au 2 janvier, le 11e monte aux avent-postes. Le trajet, bien qu'à peine de la valeur d'une demi étape normale, est un véritable calvaire. Sur les routes glacées, il y a tous les quelques mètres un cheval ou un homme par terre. Pour faire la relève en temps voulu sans se laisser surprendre par le jour, il faut porter ou tracter à bras tout le matériel.
Enfin les légionnaires sont face à face avec les boches. Ceci est une façon de parler car, des boches on n’en voit pas.
Le jour, l'ennemi reste invisible, mais dès que le lourde nuit d'hiver a jetée ses ombres sur les bois et dans les ravine, des groupes de rôdeurs, guidés par des chiens pénètrent partout dans cette ridicule ligne de petits postes placés on ne sait par qui ni comment, où l'installation et les défenses accessoires sont à l'état embryonnaires. Le légionnaire ne comprend pas très bien…… Lui qui ne pose son fusil que pour prendre la pelle, la pioche, le pic ou la truelle, se demande ce qu'ont bien pu faire les lascars, qui avant lui ont occupé cette position pendant trois mois….... mais le premier moment de mauvaise humeur compréhensible passé, il se met à l'ouvrage malgré le froid et le dureté de ce sol glacé jusqu'au tréfonds.
Le premier jour, il ne peut rien contre ce harcèlement de trappeur bien stylé mais rapidement il a compris l’astuce et bientôt c’est lui qui se promène dans les propriétés en face.
Sous prétexte de conditions climatériques dures, les Régiments voisins ne faisaient des périodes de ligne que de cinq Jours, le 11e demande à doubler la dose afin de ne pas être relevé au moment où il commence à connaitre le secteur. Bientôt les patrouilles s'en vont de plus en plus profondément chez le boche. L'une d'entre elle va faire un coup demain sur le porcherie des feldgrau et ramène trois beaux sujets à soie. Jaloux, les gars de la compagnie d’à coté partent à leur tour et retiennent avec deux seigneurs à groin, mais comme il fallait faire plus que les camarades qui avaient trois  pièces à leur tableau, ils s'en vont jusque à l'autre extrémité du village et vont présenter les armes au monument des morte de la guerre 14-18 plané a l’entrée du cimetière.
Un Jour, le projectile d'un lance grenades vient tomber dans le trou d'une première ligne où se trouvaient postés un caporal et trois hommes. La sentinelle, un petit polonais d'à peine vingt ans, s’aperçoit du danger qui courent ses camarades assoupis au fond de l'élément de tranchée et sous les yeux ébahis du Caporal qui a relaté le fait, il se couche à plat ventre sur la grenade. Il s'en est allé au ciel du Dieu des armes pour sauver d'une mort certaine ses trois camarades.
La relève du Régiment arrive après trente jours de ligne. On ne reconnait plus le secteur. D'abord les boches matés sont beaucoup moins hardis et ne s'infiltrent plus dans nos lignes et puis les trous de rats trouvés à l'arrivée se sont transformés en tranchées et abris fort habitables sinon luxueux.
Une chose pourtant chiffonne les légionnaires. Là-bas, très loin, à deux kms 500 en avant des petite postes, une longue bannière rouge à croix gammée noire flotte au sommet d’un pilon de ligne de force et a l'air de les narguer.
Ils ont jure de ne pas quitter le secteur avec cet oriflamme en place et, le nuit de le relève trois d'entre eux guidés par leur Lieutenant s'en vont, après avoir savamment contourné le village occupé, décrochent l'Etendard qu'ils ramènent discrètement sens se vanter de l'exploit, car le Commandant ne serait peut-être pas très content de savoir qu'on est allé sans rien dire aussi loin dans les lignes allemandes.
Et le Division part au grand repos…. Bien entendu, in n'en est pas question pour la Légion et le 11e reste en secteur occupant les secondes lignes, travaillant à l'aménagement du fameux fossé anti-char avec, dès l'aveu même du Général FREYDENBERG un rendement quadruple des autres unités. Pendant ce temps, les trois groupes francs du Bataillon vont chaque nuit explorez le terrain dans le "NO MAN’S LAND". Au retour de l'une de ces expéditions, le groupe franc du premier Bataillon étant rentré dans nos lignes, le Lieutenant l'envoi vers le village où est le gite de jour et s'arrête à un P.C. de Chef de section d'avant-poste pour préparer la sortie de la nuit suivante.

Il est à paine là depuis un quart d'heure qu'un baroud formidable de déclenche sur la gauche vers le poste de liaison avec les Britanniques. Le lieutenant n'hésite pas un seul instant, il a gardé avec lui son agent de liaison: "Cours vite vers le village et ramène le groupe"… Le légionnaire part tête baissée vers l'arrière, mais il n'a, à faire que le moitié du chemin, car au bruit de la fusillade et de l’éclatement des grenades, le sous-officier adjoint fait faire demi-tour et ramène ses hommes vers le Lieutenant.
En quelques instants une contre-attaque est montée et le groupe en deux vagues part tirs le poste où il semble que les chevaliers du G.R.D. se battent, toujours. En débouchant sur le plateau, la première vague est arrêtée par le feu des allemands qui ont conquis la moitié des organisations. La deuxième vaque fait un savent mouvement tournant pour prendre l'ennemi à revers et au moment où, au pas de course, elle débouche sur l'arrière de l’ouvrage, le Lieutenant enlève son groupe et bondit droit sur le boche qui tient le majeur partie de tranchées et des boyaux. On ne se bat qu'à la grenade et a la mitraillette; le groupe franc prend pied dans l'ouvrage et délivre ceux des cavaliers que l'ennemi avait capturé; le Lieutenant tombe, le bas du corps traversé par une rafale de mitraillette, mais il continue à exciter ses hommes de la voix.. L’ennemi sentant la partie perdue par l’arrivée de cette contre-attaque imprévue que rien n’arrete, lance des fusées pour demander des secours à son artillerie et bat en retraite vers son poste le plus proche abandonnant ses morts et ses blessés. Les pertes chez nous sont sévères aussi: trois morts, sept blessée dont quatre graves, parmi eux le Lieutenant dont les ailes du nez se pincent déjà, il perd son sang en abondance, on ne peut le laisser dans cet ouvrage soumis au bombardement ennemi et dominé par un petit poste boche. D'autre part, les boyaux vers l’arrière ne sont qu'amorcés et ont à peine 40 centimètres de profondeur. Qu’importe, les blessés seront ramenés. Pendent 3/4 heure, un caporal et trois hommes ramperont dans cet amorce de boyau portant chacun sur leur dos l’un des blessée grave. Le caporal qui a pris le Lieutenant en charge sent le corps s’alourdir sur ses reins. Il entend comme un souffle: Vengez-moi...Vive la Légion - et quand dans le ravin il déposera son fardeau, ce ne sera plus qu'un cadavre.
Le lendemain, le Colonel visitant les blessés graves au G.S.D., où leur état les maintient, s’entendait supplier par deux d'entre eux de leur conserver leur place au groupe franc pour quand ils seraient guéris afin de pouvoir venger le Lieutenante Tous les deux hélas sont allés rejoindre leur Chef du paradis des braves.

Trois jours plus tard, dans une affaire analogue, le groupe franc du 2e Btn. était engagé. Les légionnaires firent là aussi splendidement leur devoir et il ne faut en prendre pour preuve que le rapport que dictat à, l’Hôpital le Lieutenant Commandant qui, très grièvement blessé et amputé d'abord du bras gauche, eut le courage ayant de mourir de relater la conduite magnifique des 40 soldats qui l'accompagnaient dans son raid.

̋Tout d'un coup ce fut l’annonce de l'offensive foudroyante. Le 11e jeté d’abord en des pointe dits cruciaux où il ne se passa rien, alla s'installer à la charnière entre Meuse et Chiers où les divisions s’emmêlaient dans un galimatias, duquel il était certain qu'on ne pouvait rien tirer de bon.
Les Régiments relevé avaient une hantise de ce secteur soue bois. On racontait lors de le relève les histoires les plus abracadabrantes. Certes, la position était dure à tenir, mais n'avait rien de démonique. Les légionnaires commençaient à s'y faire, quand la 5e nuit après la relève ils eurent à subir un bombardement infernal de sept heures suivi au lever du jour d'une attaque massive des 3 Régiments de la fameuse 56e Division allemande, tellement réputée que son arrivée dans le secteur, disait l'ordre du Jour du Général Cdt. l'Armée, devait changer la situation. Certes, les assauts furent rudes à l’Allemande, c'est à dire en formations serrées, les troupes venaient à l’assaut de nos lignes en lisière de bois. Mais la vieille Légion n’en eut eure. Au bruit de la fusillade, des hommes partis a la corvée de soupe qui avait lieu à la prime aube, firent demi-tour et allèrent rejoindre leur groupe sous la mitraille. Comme ils disaient : « A la Légion on ne baroude pas les uns sans les autres ».

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Dés le début il s’avéra que l’affaire serait chaude. Le flot ennemi qui sans cesse croisait, le feu intense de l’artillerie sur tout ce qui n’était pas première position, le mordant de l'assaillant, son étouffement par des éléments de toutes armes.....bref, c'était bien le signe de la grosse attaque. ...à 5 heures, à 7 heures, à 9 heures, à 13 heures, la poussée allemande pesa de tout son poids. mais rien n'ébranle le vieux "ROC-LEGION".
Si des infiltrations ennemies, grosses il faut l'avouer, pénétrèrent dans nos lignes, elles connurent un sort malheureux, car les légionnaires se battaient la rage au cœur pour venger leur bon Monsieur l'Aumônier dont je vous dirai l'histoire tout à l'heure et le Capitaine de G., lâchement assassiné le matin.
27.05.1940
En effet, le 27 mai lors de l'attaque de 5 heures, le Commandant du bataillon qui semble recevoir le gros de la poussée, privé depuis le bombardement nocturne de toutes liaisons avec ses compagnies en ligne, envoit son Capitaine Adjudant-Major, escorté d. quelques légionnaires pour se rendre compte de la situation. Sous bois et à peu près à mi-chemin entre le P.C. du Bataillon et les premières lignes, le Capitaine trouve un Officier allemand et 4 hommes adosses à des arbres et qui, en voyant venir les nôtres, levèrent le bras. Le Capitaine s’avance vers eux, seul, afin de leur inspirer confiance, mais il n'en était plus qu'à 4 ou 5 mètres quand les 5 ennemis se jettent à terre et que derrière l'un des arbres se dévoile une mitraillette dont le pauvre Capitaine reçoit toute la décharge. L'un des suivants tombe aussi, mais les autres se sont vite ressaisis. Pas un des traitres n'en réchappera pas, pas plus d'ailleurs que tout ennemi en armes ayant réussi à s'infiltrer et trouvé dans les bois au cours des deux nettoyages qui furent opérés dans la journée.
Quand de son propre aveu, l'ennemi confesse pour cette journée du 27 Mai 2560 morts - Quand il a été par la suite 36 heures sans tirer un coup de fusil, occupé qu'il était à ramasser ses victimes pour les envoyer au four crématoire, dernière demeure du guerrier nazi, il faut tout de même que la leçon qu'il avait reçue du 11e Etranger était rude.
Ne nous éternisons pas à raconter les beaux faits dont cette journée fut émaillée. Nous n'en finirions plus. Citons en seulement trois:-
"A la jonction de deux Bataillons, une solution de continuité s'est soudainement produite par le chute malencontreuse de quelques gros obus au cours du pilonnage nocturne. C'est là, qu'à l'attaque de 5 heures, l'ennemi trouve à s'infiltrer. L'occasion est magnifique et dans une clairière, quelques centaines de mètres en arrière, deux officiers allemands rassemblent leurs hommes, au nombre d'une soixantaine, pour préparer probablement un coup sur notre seconde position, quand, du bois surgissent deux hommes, un sergent et un caporal, fusil mitrailleur à la hanche. En quelques secondes, la moitié du groupe était fauchée et le reste, terrorisé par ces deux hommes qui leur criaient en allemand "rendez-vous ou vous êtes morts", se rendit. Quelques minutes plus tard, l'un des officiers allemands fait prisonnier, l'autre était resté tue dans la clairière, nous disait: "Ces deux soldats ne sent pas des hommes mais des démons". Hommage sensible au cœur des légionnaires car sans le savoir, cet officier allemand plagiait le Général mexicain qui disait des hommes du Capitaine DANJON à CAMERONE "Ce ne sont pas des hommes, ce sont des démons". Serait-ce par hasard pout cela qu’en Décembre 1939, le speaker de STUTTGART annonçant notre arrive au Front disait : "Hier l’infernale légion est montée en ligne à X"…. ?
"Pour garder cette position sur laquelle les trois Régiments de la 56e Division, renforcée des "Stosstruppen" de la 52e s’acharnent, les légionnaires, le ventre creux (car la corvée de soupe du matin n’est pas montée) font des prodiges au corps à corps avec audace déconcertante. Ce vieux qui a 18 ans a services est en train de se faire panser au poste de secours avec trois éclats de grenade dans la poitrine. Il a le torse nu, ruisselant de sang et le docteur va lui faire son pansement quand un agent de liaison arrive en disant "les boches se sont infiltrés, ils sont à 150 mètres d’ici sur le layon.
Le vieux s’échappe des mains du docteur, ramasse une musette de grenades qu’a déposée la un autre blessé et s’elance vers le layon. Il rendre 20 minutes plus tard avec une 4e blessure à la poitrine ; cette fois c’est une balle de mitraillette qui l’a traverse de part en part sans toutefois touche aucun organe essentiel, et trouvant le médecin du Bataillon affaire à panser d’autres blesses, il lui dit :" Je passe au poste de secours du Régiment".

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Je tiendrai bien jusque là. Les vieux comme moi, ca a la peau dure. Vous avez trop de travail ici".
Si vous voulez une image du spectacle de cet homme promenant sur le piste son torse sanguinolent aux 4 plaies béantes, imaginez la statue religieuse de St. Sébastien sortie peinturlurée en vif de chez un de ces marchands de bondieuseries de Saint-Sulpice, comme disait Huysmans….
"Sept fois dans la journée, ce petit bleusard qui a à peine 20 ans, a fait la liaison sous la mitraille et les balles entre 11 P.C. de son Btn.et le P.C. du Régiment; la 7e fois, il arrive et s'effondre sur le parapet du bout de tranchée qui est tout le P.C. du Colonel et tend son papier en disant "Je suis foutu, vidé….." Il a les vres violettes et sèches et des yeux grandes comme des pièces de cent sous. Pendant qu'on dépouille son papier on lui fait boire un peu de café et il finit par pouvoir parler et avouer que depuis la veille midi il n's pas mangé ( il est 15 heures 30} et que ses jambes ne veulent plus le porter…….. on lui donne deux tablettes de chocolat qu'il engloutit, boit encore un peu de café et comme il entend qu’on désigne un radio dont l'appareil a été demoli quelques heures plus tôt pour se débrouiller, pour essayer de trouver le P.C. du Bataillon, il dit "Il ne trouvera jamais celui-là…. je vais avec lui". Une heure et demi plus tard il revenait, le bras droit en écharpe, un revolver dans la main gauche et poussent devant lui cinq prisonniers. "Là, dit-il dans la poche de mon pantalon, j’ai le papier en réponse au votre. Le radio a été tué en allant à 150 mètres du P.C. du Btn. par le même obus qui m’a cassé le bras. C'est le Commandant qui m’a dit de vous amener les prisonniers, mais je dois vous dire qu'il en manque un. Il faisait des chichis pour avancer sur le piste, alors je lui ai foutu un coup de revolver dans la gueule. Il n’a pas fait OUF".
Le lendemain de cette journée mémorable, le Colonel Commandant le Régiment recevait du Général Commandant la Division la lettre suivante :
Mon cher Colonel.
Trois mots seulement pour vous remercier du magnifique succès d'hier et vous exprimer mon admiration- "Bravo la Légion". Faites en part à vos Officiers et à vos légionnaires, en leur disant toute mon affection.

Signé: Général de VERDILHAC

Cette simplicité dans l'admiration d’un grand chef se passe, je crois, de tout commentaire.

Un beau jour, un ordre stupéfiant arrive au Régiment. Il faut aller prendre de nouvelles positions à l'arrière car, à gauche, l'ennemi a percé et nous risquons d'être tourné…… Faites avaler à un légionnaire que le terrain qu'il a gardé dans des combats acharnés doit être laissé à. l'ennemi et qu'il faut filer presque honteusement vers l'arrière, est chose difficile.
Une consigne toutefois est rigoureusement observée: "Il faut laisser à l’ennemi le moine possible de choses utilisables". Une rage de destruction s'empare alors da lui.
L’ordre est de commencer le mouvement à 21 heures. Bon.....mais il faut d'abord détruire. Le mouvement n'a commencé qu’à une heure du matin, mais l'allemand n’a pas trouvé chez nous un gourbi où abriter, une cartouche ou un manche de pelle utilisable.
La Division s'était portée sur une nouvelle position vers ces bois célèbres où les chasseurs du Colonel DRIANT s'illustrèrent en 1916. Il avait plu ce jour-la un de ces crachine comme il sait en tomber dans la Meuse. Les routes étaient des patinoires encombrées par les colonnes triples ou quadruples ou chevauchaient hommes, animaux, engins mécaniques. Un de nos camions charge a 5 tonnes d’essence faut une fausse manœuvre et glisse dans le fossé. La conducteur navré fait appel a tous ceux qui passent pour le tirer de ce mauvais pas. Quelques essais hâtifs mais abandonnes sont tentes l’arrière-garde constituée aves le G.R.D. arrive et oblige le légionnaire a filer en abandonnant véhicule et chargement. A une quinzaine de kms a l’arrière, le conducteur trouve par hasard sur la place d’une village encombre le Sergent d’échelon qui s’était mis en quête de son camion d’essence : "Ou est ton Berlit" ? "Là-bas dans le fossé sur la route de DUN. Les cavaliers

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Les cavaliers du G.R.D. m'ont obligé a l’abandonner en disant que les boches arrivaient".
"Y as-tu mis le feu ?". "Non, je n’y ai pas pense". - ."Ah tu n'y as pas pensé, mais tu as laissé cinq mille litres d'essence et un camion tout neuf entre les mains des boches….. et bien, je vais aller y mettre bon ordre moi" et sautent sur sa moto, il disparait dans la nuit en direction de DUN.
Aux avant-postes à une douzaine de kms de là, le sergent est arrêté par les cavaliers du G.R.D. - Il discute, veut à tout prix passer. Un Lieutenant intervient et dit "votre camion est au moins à trois kms d'ici et doit être depuis longtemps entre les mains des boches, car à la tombée de la nuit nous avons vu l’ennemi sortir de DUN et franchir la Meuse. Nous nous attendons d'un moment à l'autre à les voir surgir et noue ne pouvons rien pour vous car nous ne sommes ici qu'en action retardatrice".
Mon Lieutenant, il ne peut pas être dit que des légionnaires aient laisaés aux boches quelque chose d'aussi précieux que 5000 litres d'essence.
A mes risques et périls, laissez-moi tenter le coup d’aller mettre le feu au camion". Le Lieutenant influence par l'air décidé de ce grand garçon dit" Il n'y a que les légionnaires pour avoir des idées pareilles…. allez-y". Cinq minutes plus tard, une. immense flamme embrasait le ciel et sur ce fond de rouge sang, les cavaliers virent rentrer courbé sur sa machine, le sergent cinéaste d'outre-Atlantique. fils d'un grand ami de la Légion. Il s'arrêtât à la hauteur du G.R.D. et dit" Mission accompli". Je vous remercie mon Lieutenant".
Ce que le sergent n'a pas dit en rendant compte que le camion avait été incendié, nous l'avons su par l’officier de cavalerie des avant-postes: c'est qu'il était rentré sous le grêle de balles. Mais il avait trop de cran naturel pour se vanter d'un aussi petit détail."
Et leu journées difficiles et pénibles se succèdent. On se bat le jour pour maintenir l'ennemi, on décroche la nuit pour aller se remettre à la hauteur des autres. Essayer de faire comprendre à des légionnaires qui se battent comme des chiens le jour, qui ne laissent pas un pouce de terrain à l'ennemi, qu'ils doivent s'en aller la nuit parce que cette façon de faire s’appelle du repli stratégique…… nous pouvons vous assurer que c'est dur.
18.06.1940
L'aube du 18 juin nous trouve dans un ravissant petit village tout fleuri de roses, SAINT-GERMAIN sur Meuse. La journée météorologique s'annonce belle; la preuve en est c'est que ce sale petit avion à. croix gammée que les légionnaires ont surnommé "Dudule" ou le "Mouchard" est déjà au dessus de nous alors que les coqs ont à peine chanté. Mais ce jour-là "Dudule" salue son dernier matin car les mitrailleuses du 1e Btn, qui depuis longtemps l'expèrent, interrompent ses ébats d' observateur maitre du ciel. Quelques rafales bien ajustées mettent fin à la carrière du "Mouchard" qui va s’affaler dans un champ en bordure du bois de VOID. Pour n’être pas taxes de cravateurs, les mitrailleurs du 1e Btn. Vont couper un bout de l’hélice et le rapportent comme pièce de conviction. Cette journée sera la plus chaude de celles que la Légion aura à endurer. Les Ordres de la Division sont de tenir coute que coute 3 ponts de la Meuse et 6 kms de front long de cette rivière, jusqu’au 19 à 4 heures du matin. Le 11e tiendra sous une avalanche titanesque de fer et de feu, seul, absolument seul, sans l’appui d’un seul obus de notre artillerie, tandis que les pièces allemandes qui nous apilennaient tiraient à vu des bois d’en face à quelques 3 kms de nous. En fin de journée, du ravissant coquet petit village fleuri, il ne restait que des ruines fumantes autour du clocher écroulé ; entre les mains des docteurs au poste de secours il était passé 383 blessés de chez nous et les positions étaient jalonnées de cadavres, mais nous tenions toujours nos trois ponts et nos six kms de front. Un Chef de Bataillon, 2 Capitaines, 4 Lieutenants, 1 Médecin étaient parmi les Morts ; Les docteur, les infirmiers, les brancardiers firent des prodiges pour ne pas laisser un seul blessé sans pansement et quand le lendemain à 3 heure les boches s’emparèrent de la cave ou le medicin-chef a voulu rester après le rempl pur ne par abandonner les 95 blessés qui n’ont pu être évacues à temps, ils dirent à ce remarquable officier "Il est inimaginable que votre Régiment ait pu tenir hier sous le feu d’enfer que nous lui fait

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subir, qu’il n’ait pas laché ce village malgré nos assauts et vos pertes, surtout que vous n’avez pas eu un seul obus français pour vous soutenir- ;
Dartez, Monsieur le Docteur, avec vos blessés, ils ont besoin de vos soins.
Nous nous chargeons de rendre à vos morts les honneurs qu'on doit à des braves ce cette espèce."
Pour cette journée encore il serait difficile de citer tous les traits d’héroïsme; il faudrait des volumes….. Pourquoi me retiendrai-je pourtant de citer le cas de ces deux observateurs du Régiment qui, placée dans le clocher, restent à leur place bien que la flèche ait déjà attente trois fois et ne descendent qu’avec les cloches quand celles-ci s'abattent avec toute l’armature dans les ruines fumantes de l’église.
Et cette équipe de brancardiers (2 hommes) qui, à elle seule alla chercher le long de la Meuse 57 blessés malgré les rafales de mitrailleuses qui enfilaient les trois rues principales du village.
Et ce petit Lieutenant qui, au milieu du Pont d’UGNY, au nez et à la barbe des boches réparait (les spécialistes ayant disparus) les cordeaux détonants du système de destruction abimés par les éclats d’obus.
A vous, morts du 18 Juin, que l'ennemi avait promis d’honneur, je souhaite que votre sépulture soit le cimetière de ST.GERMAIN sur Meuse. Ce nom passera dans les fastes historiques du 11e…….. Et quand, à la saison nouvelle, les roses que vous ayez vues épanouies à l'aube de votre dernier jour, refleuriront, ce sera pour embaumer cette terre que vous avez si héroïquement défendue.
Le lendemain sur la route de BLENOD LES TOUL les engins blindés allemands faisaient pour la seconde fois connaissance avec nos canons de 25.
Cette rencontre ne fut pas plus heureuse pour eux que celle de l'avant-veille, puisque les 4 engins apparus furent détruits. Les fantassins portes tentèrent malgré tout deux fois l'assaut de nos positions qui n'étaient que des lisières de bois sans l'ombre d'une organisation, mais deux fois, ils firent demi-tour à la vue de ces légionnaires décidés qui n'hésitaient pas à sortir des couverts pour mieux ajuster leurs coups et pour pourchasser ces Feldgrau-téméraires.
Jusque à l'ultime minute, pour ne pas dire au delà, le 11e tint le boche en échec au point qu'on avait l’impression que l'ennemi n’insistait plus, dès qu’il sentait qu'il avait affaire a la Légion. Il préférait aller manœuvrer ce qui aurait dû être les ailes.
Je vais vous raconter pour terminer la très belle et simple histoire de l'aumônier du Régiment

"Il s'en était venu à la 6e D.I.N.A. arrivent d’une paroisse ouvrière rouge du Nord, là où la climat et le, vie sont rudes, les âmes difficiles à garder. Dégagé de toutes obligations militaires, il avait néanmoins demandé à servir au Front comme aumônier et pour première affectation on lui donna la Légion. Il fait dire qu’à cette annonce ce bon Monsieur l’Aumônier fut un peu catastrophe – La Légion, cettre troupe de saoudards qu’on  dépeignait un peu partout uniquement comme des ivrognes sans foi ni loi "…… il tombait bien. Par esprit religieux, il s’en relouit pourtant, se souvenant de la parole de l’Evangile qui dit :  " qu’il n’y a plus de joie au ciel pour un pêcheur qui revient à la maison du Père qu pour cent justes qui preseverent ".
Le premier Dimanche ou il monta en chaire dans un petit village de l’arrière, ce fut pour dit sa joie d’avoir été  affecté au 11e et pour annoncer qu’en vrai légionnaire il était venu pout servir et pout partager nos joies, nos souffrances, nos deuils ; qu’il entendait servir parmi nous en prêtre, c'est-à-dire en autre Christ et qu’il offrait bien volontiers sa vie si celle-ci pouvait etre utile a la gloire de la France et de la Légion".
Et dès lors on ne vit plus que lui dans tous les cois dangereux. Il ne passa pas un jour sans visiter tous les éléments les plus avancés et les plus exposes. Les légionnaires n’avaient pas de meilleur et de plus fidele camarade que lui. Mais ou on le voyait toujours, c’était aux endroits ou " ca bardait" suivant l’expression du légionnaire.
21.05.1940 - 22.05.1940
Qui ne se souvient a la 6e D.I.N.A. de cette atroce nuit du 21 au 22 Mai ou la relève se fit sous une pluie de fer et de feu ?.... pas un point de passage oblige qui ne fut pilonné par la grosse artillerie allemande. Partout des chevaux éventrés,

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Partout des chevaux éventrés, des véhicules renverses, des morts en travers les pistes, des blessés hurlants ; les tirailleurs affolés et ayant perdu leurs guides se tapissaient dans les buissons et attendaient la mort ou l’intervention d'Allah avec tout le fatalisme de leur race. Au milieu de ce chaos, une grande silhouette noire allait d’un blessé à l'autre, remettait en confiance les apeurés et les perdue, mais surtout aidé du Médecin-Chef du Régiment galvanisait littéralement les équipes d'infirmiers et de brancardiers régimentaires qui ne pouvaient rien refuser à cet homme de Dieu aussi calme sous la Mitraille que sur les marches d'un autel.
A partir de cette nuit, sa réputation était faite au 11e et pas un blessé du Régiment ne peut se vanter de n’avoir pas vu ce prêtre extraordinaire à son chevet, au poste de secours au près de lui sur le terrain où il était tombé. Sa bonté inépuisable, sa saine gaieté, son cran extraordinaire avaient fait de lui en quelques jours l’homme le plus populaire du Régiment.

27.05.1940
Hélas…. au matin du 27 mai lors que penché sur un moribond il lui prodiguait les suprêmes consolations, un sauvage éclat d'obus vint lui arracher un bras et la moitie du tronc. On le retrouva quelques minutes plus tard couché près du brancard de l'homme qu'il venait d'assister. Son visage était d'une sérénité absolue, tout empreint de cette paix promise sur la terre aux hommes de bonne volonté. Sa belle âme était allé là-haut chercher sa récompense.

 

Nous avons conscience de ne nous être battus en bons et vrais Français, de n’avoir pas démérite des anciens. Tous nos grands Chefs étant partis en captivité, Le Régiment ne se verra pas discerner les brevets officiels attestant sa bravoure et fera figure de parent pauvre, quand les camps allemands s'ouvriront et que ceux qui n'auront pas réussi a s’évader rentreront.
Que pourront-ils dire, ceux qui se battaient encore 6 heures 15 après la capitulation, quand d'autres qui auront battu les, records de vitesse dans la fuite aux Pyrénées, leur opposeront des diplômes de citations collectives.
Ils n’auront pas même a leur opposer un brevet individuel puisque leurs Chefs ne sont pas là pour attester qu’ils furent vraiment des Héros.
Tant pis….. la fatalité l’aura voulu, mais tous les légionnaires du 11e ont le droit de porter haut la tête. Ils se souviennent avec fiereté des beaux fait d’armes du Régiment, qu’ils inscrivent dans leurs cœurs ces dates prestigieuses des 27 Mai et 18 Juin aves les Noms d’INOR et de SAINTE-GERMAIN, qu’ils citent aves orgueil les commentaires de l’ennemi en admiration devant la conduite du Régiment et qu’ils se disent que les rubans galvaudés en valent pas la satisfaction du devoir accompli pour le soldat digne de ce nom comme sait l’être « LE LEGIONNAIRE » .

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